Aujourd’hui, j’ai la chance d’être entouré d’une équipe dynamique, compétente et motivée qui me permet de toucher des centaines de milliers de personnes à travers la francophonie tout en travaillant seulement une journée par semaine. Je n’ai pas toujours été aussi bien entouré.
Le panorama
En 2009, quand je commençais à avoir pas mal de succès avec mon entreprise et que je me demandais comment faire pour passer au niveau supérieur, j’ai eu la chance de m’inscrire à un programme pour entrepreneurs organisé par un célèbre entrepreneur américain. En fait, il s’agissait d’une sorte d’abonnement. Vous receviez un magazine pour entrepreneurs chaque mois et pile au moment où je me demandais comment faire pour structurer mon activité et la faire exploser, j’ai reçu cette newsletter par la poste. Quand j’ai commencé à le lire je me suis dit que c’était la solution.
La solution dont parlait l’auteur c’était de l’importance de mettre en place ce que nous appelons des « procédures ». L’idée, c’était de se dire que si nous voulons exceller dans notre entreprise et avoir un niveau de qualité élevé à fournir aux clients, il fallait également pouvoir se développer sans être trop dépendant de l’entrepreneur. L’idée mettait l’accent sur l’importance d’écrire notre process de façon structurée pour que toute personne que nous embauchons par la suite et qui doit faire la mission puisse juste lire la procédure, comprendre comment ça fonctionne chez nous et être capable d’exécuter la procédure et faire sa mission avec le même niveau de qualité que celui attendu au quotidien. Je me suis tout de suite dit que c’était une idée géniale qu’il fallait que j’adopte.
Le plan
Mon plan était le suivant : puisqu’il fallait que je mette en place des procédures afin de pouvoir par la suite déléguer et donc me libérer du temps, je me suis dit que ce qu’il me fallait c’était recruter quelqu’un qui puisse être une sorte de manager de projet à qui j’allais donner cette newsletter expliquant comment faire des procédures. Sa première mission allait être de créer la procédure mère, c’est-à-dire la procédure qui allait expliquer comment faire des procédures afin que les autres puissent le comprendre pour pouvoir après commencer à décrire tous nos process sous forme d’un manuel de procédures pour que par la suite ça puisse être beaucoup plus simple pour moi de déléguer. Voilà quel était le plan.
Au même moment, un de mes anciens clients avec qui j’étais devenu ami, appelons-le Didier, cherchait à quitter son job dans une banque pour en trouver un nouveau qui aurait permis d’utiliser ses compétences différemment et d’augmenter également très rapidement ses revenus. Comme nous nous connaissions bien et qu’il était un ancien client satisfait qui connaissait déjà bien ce que je faisais, je lui ai proposé de faire de lui mon tout premier salarié. Au début, il allait gagner 2000 euros par mois mais l’entreprise allant exploser, il allait finir par en gagner jusqu’à au moins 5000. Je lui ai donc expliqué que sa première mission serait de créer une procédure expliquant comment en créer d’autres. C’était ça mon super plan.
Le plantage
J’ai donc embauché Didier. Le contrat d’embauche démarrait à une date, disons le 1er octobre. C’était écrit dans le contrat. Cependant, Didier discutait sur les termes qui avaient été décidés. La rémunération, le travail à distance, etc. Nous avons discuté tout le mois d’octobre. Pendant ce temps, Didier ne travaillait pas car il n’approuvait pas tous les termes du contrat. Le problème était que le contrat démarrait quand même officiellement le 1er octobre, ce qui fait que le premier mois, rien n’a été réalisé. Zéro mission, zéro travail.
Nous en arrivons au second mois suivant l’embauche de Didier et plus ou moins à la moitié de ce second mois, donc en mi-novembre environ, nous sommes enfin d’accord et Didier signe le contrat de travail. Je rappelle donc à Didier que sa première mission est de réaliser la procédure mère. Seulement, au bout d’un moment, je commence à me dire que Didier ne me donne aucune nouvelle. Je n’avais aucune idée d’où il en était dans la réalisation de cette procédure mère. Nous étions déjà en fin du mois de novembre et rien ne semblait avoir bougé. Je me suis retrouvé mécontent de comment les choses évoluent, ou plutôt devrais-je dire de leur manque d’évolution. J’avais payé Didier pour déjà un mois et demi sans que rien n’ait avancé et il semblait qui plus est faire l’autruche. Je n’avais aucune idée de ce qu’il faisait.
Didier m’a plus tard dit qu’il avançait dans le projet qui lui avait été demandé de réaliser. J’avais à l’époque offert à Olivier Roland, qui était mon client consulting, de donner à ses clients une conférence que j’allais co-présenter avec lui pour expliquer des stratégies marketing que ses clients pouvaient utiliser dans l’entreprise. J’étais devenu assez proche d’Olivier donc je me suis confié à lui en lui expliquant la situation compliquée avec Didier. Par chance, même si j’ai aidé Olivier à lancer son entreprise en ligne, il était tout de même entrepreneur depuis plus longtemps que moi. Il avait une société de dépannage informatique basée à Lille. Il avait donc déjà eu des salariés. Ayant lui aussi commis des erreurs dans ses premières embauches, il m’a fait comprendre que Didier n’allait jamais rien faire de concret et à la place soit faire la victime ou faire le bourreau mais dans tous les cas créer une situation de conflit. Olivier m’a donc conseillé de confronter Didier et de mettre fin à son contrat.
Cette situation me stressait fortement car je n’avais jamais licencié personne de ma vie, Didier étant mon tout premier salarié. Je ne savais pas trop comment il allait le prendre, si ça allait mal tourner ou bien se terminer. Nous étions à ce stade sortis de la période d’essai indiquée dans le contrat, ce qui allait entraîner beaucoup de complications.
Au final, Didier est resté quatre mois dans mon entreprise. Entre son salaire, les charges sociales, les charges patronales, la procédure de licenciement et les indemnités, me séparer de Didier m’a coûté 17 000 euros. L’entreprise en a aussi pris un coup car tout le temps que je passais à m’occuper du cas de Didier était du temps que je perdais à ne pas vendre mes produits.
J’avais à l’époque une courbe graphique des comptes de l’entreprise qui montait progressivement. Mais les problèmes avec Didier n’ont fait que faire chuter la courbe, jusqu’à ce que l’entreprise se retrouve dans le négatif de plusieurs milliers d’euros. Toute mon attention était sur ce conflit avec Didier.
J’ai donc, comme je disais, dû débourser 17 000 euros alors qu’à l’époque ma boîte faisait 190 000 euros de chiffre d’affaires par an. J’avais donc perdu une partie importante de mon chiffre d’affaires.
Didier a tout de même rédigé une page de la fameuse procédure mère. Oui, en quatre mois, il n’avait rédigé qu’une page Word…Didier, mécontent d’être licencié, ne m’a même pas donné cette page. J’ai donc payé 17 000 euros pour une feuille de papier que je n’ai jamais reçue. Toute cette histoire a été une leçon et un apprentissage assez énorme.
La prise de conscience
Qu’ai-je retiré de cette « formidable » épopée de mon premier recrutement ?
Tout d’abord, j’ai appris de ce premier recrutement que, en fait, si ça ne fonctionne pas, il vaut mieux dire stop dès le départ plutôt que laisser les problèmes se créer. Je me suis rendu compte que la procédure pour arrêter de travailler avec quelqu’un c’est stressant et c’est anxiogène. Je n’ai pas aimé faire ça mais le stress de cette période où il a fallu mettre un terme au contrat de Didier était quand même un stress beaucoup plus agréable que le stress de la période où clairement Didier n’était pas en adéquation avec ce que je voulais faire.
Une des choses que j’ai apprises, c’est d’éviter de recruter des gens de mon entourage.
Dans le cas de Didier, il était mon ami avant d’être mon employé mais du coup, ça a biaisé mon jugement et je me suis rendu compte que je ne savais pas recruter. Lors de mes recrutements suivants, j’ai essayé de mieux faire mais je n’y arrivais toujours pas. Il m’a fallu du temps avant que je me rende compte que recruter quelqu’un qui est avant tout votre ami crée un réel manque d’objectivité sur ce recrutement et que c’est se tirer une balle dans le pied.
Enfin, ce que j’ai vraiment retenu et qui a fait une différence considérable dans ma vie d’entrepreneur, c’est qu’en fait je ne pouvais pas déléguer la création des procédures. En fait, dans votre entreprise, la personne qui doit écrire une procédure sur comment faire une tâche ne peut être personne d’autre que la personne effectuant la tâche en question. Si vous voulez avoir des procédures qui expliquent comment faire votre facturation, c’est la personne qui fait votre facturation qui doit aussi être celle écrivant la procédure. Vous pouvez donc retenir que celui qui doit rédiger une procédure doit toujours être celui qui en est responsable.
Quant à la procédure mère, c’est forcément vous, l’entrepreneur, qui allait devoir la rédiger. Vous ne pouvez pas embaucher quelqu’un pour le faire.
Pourquoi ? Deux raisons. Le premier principe, donc que c’est celui qui fait l’action qui doit en écrire la procédure. La seconde raison est qu’il faut montrer l’exemple. C’est impossible d’avoir des gens qui sont motivés chez vous pour faire en sorte que les choses soient carrées si vous, l’entrepreneur, êtes un électron libre refusant de vous soumettre à l’idée de créer des procédures. Il m’a suffi de l’expérience avec Didier pour le comprendre et me dire que je devais dorénavant apprendre à faire moi-même mes procédures.
Je vous recommande très fortement de lire le livre Work The System de Michael Carpenter. Ce livre explique en long et en large comment faire ses propres procédures.
Du jour au lendemain j’ai donc pu commencer à mettre en place ce système, ce qui fait que maintenant dans mon entreprise j’ai plusieurs centaines de procédures qui décrivent tout.
Par exemple comment réaliser ses podcasts, comment les mettre en ligne, comment créer des formations, comment accompagner les clients, comment faire les factures. Tout a su être mis en place dès l’instant où j’ai réalisé que je devais moi commencer à créer des procédures plutôt que de les déléguer directement.
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